Pour une autre PAC salue l’organisation du débat public Impactons ainsi que les cycles de concertation organisés avec les parties prenantes, qui traduisent une volonté de concertation supérieure à celle existante dans la majorité des États membres de l’UE. Néanmoins, les arbitrages finalement adoptés ne reflètent pas les avis majoritairement exprimés au sein de ces différentes arènes de concertation. Ces exercices de recueil de nombreux avis ne sont en rien juridiquement contraignants pour les autorités publiques, qui ont finalement fait le choix de faire primer les revendications des organisations agricoles traditionnelles, non compatibles avec l’avis exprimé par les citoyens ou les organisations qui les représentent.
Les propositions de Pour une autre PAC pour répondre à cet enjeu portaient essentiellement sur la création d’aides couplées (c’est à dire « ciblées ») en faveur des fruits et légumes frais et des légumineuses à destination de la consommation humaine. Si nous saluons la création d’une aide couplée pour le maraîchage, la faiblesse de l’enveloppe allouée ne devrait permettre de soutenir qu’une infime minorité des fermes produisant effectivement des légumes. La faible ampleur de cette nouvelle mesure ne la rendra pas en capacité de développer significativement la production de fruits et légumes frais, bénéfiques pour la santé mais que nous importons pourtant à hauteur de 50% ! L’exclusion de l’arboriculture de cette mesure est très regrettable, sachant que cette production est largement en déclin en France. Concernant les légumineuses, les aides couplées bénéficieront majoritairement aux protéagineux, alors que les légumineuses fourragères et celles à destination de la consommation humaine devraient être au contraire proportionnellement plus soutenues car elles s’inscrivent dans une logique de transition alimentaire et de synergies territoriales.
Pour une autre PAC soutenait la création d’une aide forfaitaire pour les petites fermes, une possibilité offerte aux États Membres par le règlement européen. Son absence dans les arbitrages va à l’encontre des déclarations répétées du ministre promouvant la souveraineté alimentaire, puisque les petites fermes (c’est-à-dire les fermes réalisant des productions qui se font par essence sur de petites surfaces) sont actuellement peu soutenues par la PAC alors même qu’elles permettent de répondre à des besoins d’approvisionnement locaux. Par ailleurs, les mesures du second pilier comme l’aide à l’installation connaissent une légère augmentation de budget, une nécessité quand on connait l’importance de l’installation pour répondre à la demande croissante d’approvisionnements locaux. Le budget pour les mesures LEADER est quant à lui maintenu, mais ce sera aux Régions de décider ce qu’elles financeront via ce dispositif. A ce stade, la relocalisation n’est jamais pensée à l’échelle d’un territoire et peu de moyens sont mis pour favoriser les démarches collectives misant sur une synergie entre acteurs locaux.
La PAC a la possibilité de soutenir le développement de l’agriculture biologique (en finançant la conversion) et de rémunérer les paysans déjà en bio pour les services environnementaux qu’ils rendent à l’ensemble de la société. Les arbitrages pris par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation sont le reflet d’une stratégie assumée : favoriser la conversion (dont le budget augmente dans le second pilier de la PAC, pour répondre à un objectif de surface en bio de 18% en 2027), au détriment d’une rémunération significative des services environnementaux rendus par les fermes déjà converties. Grâce à un arbitrage de dernière minute, l’AB bénéficiera toutefois d’un troisième niveau de rémunération dans l’éco-régime, à hauteur de 110 euros, soit 30 euros de plus que la certification « Haute Valeur Environnementale » qui demeure au deuxième niveau. Même si ce montant reste insuffisant pour compenser les pertes liées à la suppression de l’aide au maintien en 2017, il permet de reconnaître que les avantages environnementaux et sociaux des certifications bio et HVE ne sont pas comparables.